Comme un échos à Lenz…
La profondeur de la forêt maintenant. Il n’arrête plus de pleuvoir, l’eau tombe par cascades et remonte en fumées de chaque repli, replat, de derrière chaque crête, comme d’un incendie ayant pris de toutes parts, calmé par la pluie, mais sans fin, comme si la forêt couvait de gigantesques tas de charbon se consumant. Le chemin descendant des hauts plateaux est encadré de falaises d’où chute l’eau. La forêt est toujours plus profonde et quand mon regard cherche le fond de la vallée, entre les lianes et les mousses, je ne trouve que des surplombs annonçant d’autres avalanches de végétation jusqu’au bouillonnant torrent, futur fleuve, dont j’ai vu suinter les premières gouttes dans la mousse épaisse. Près des sommets. Inutilement nous tentons de nous abriter au moyen de grandes feuilles que nous tenons comme des parapluies, l’eau ruisselle de toute part. La voie creuse s’enfonce, et de chaque côté c’est la nuit, la forêt sans fin, des heures de forêt derrière, des heures devant. Plus loin, sur la gauche, le chemin longe le vertige, mais bientôt le même vertige grondant m’accoste à droite. Pourtant à aucun moment les impétueux torrents ne rompent la résistance de l’arête sinueusement dressée entre eux. Ils creusent des falaises, des cirques, des puits, relancent leurs attaques, mais jamais ne confluent. Mes pieds sont trempes, mes yeux et mon dos pleins d’eau, je dois calculer chacun de mes pas, alors je vois à peine le plafond que forment au-dessus de nous les fougères arborescentes et que je marche sur un tapis de pétales de roses. Le paradis est ainsi fait que parmi les énormes racines noires retournées, dans le sérieux éboulement de terre grasse et de roches, des pétales de roses se sont aussi éboulés.